138e congrès, Rennes, 2013 - Se nourrir. Pratiques et stratégies alimentaires

jeudi 25 avril 2013 - 14:00


Thème VI. Représentations et alimentation

Sous-thème : VI.B. Manger moral, manger sauvage

Titre : Nature en bouteille : de « purs » vins « vivants » ? Ou vins vivants, vins sauvages

Présidents :
DALLA BERNARDINA Sergio
, professeur d'ethnologie à l'université de Brest
LE COADIC Yves-François , professeur honoraire de sciences de l'information au CNAM (Conservatoire national des arts et métiers), Paris

Si la majorité des vins sont produits aujourd’hui dans le monde de manière industrielle, on observe dans le même temps l’installation d’un courant fort - en France notamment – de producteurs s’engageant dans la culture biologique, biodynamique ou naturelle. Le cahier des charges diffère selon les vignerons -et vigneronnes- et les législations auxquelles ils se réfèrent – dans le cas où ils choisissent d’entrer dans un label. Dans ces trois démarches, différents degrés d’investissement existent, mais toutes suivent une même rhétorique, celle du retour à la nature. La nature mythifiée, dotée de pouvoirs, comme celui de donner le « meilleur » et le « sain ».
Le retour à des pratiques plus « naturelles » de vinification et de traitement de la vigne et des sols s’enracine comme un monde parallèle dans la sphère vitivinicole. Ces professionnels en appellent « aux bienfaits » séculaires de la nature pour développer des produits « épurés », dans lesquels l’intervention humaine se limite à une dimension maïeutique. Les intrants chimiques, alliés objectifs de l’immense majorité des producteurs de vin aujourd’hui dans le monde, ont chez les « nature », le statut d’ennemi. Ennemi du goût et de la santé. Aux vins conventionnels corsetés par la technique et le « progrès », s’opposent des vins qualifiés de vivants, difficiles à apprivoiser, subversifs. Ces vins « sauvages » évoluent d’ailleurs hors du sentier des appellations contrôlées dans la plupart des cas.
Effet de mode, suivisme des tendances du marché, volonté de se démarquer, prise de conscience des effets désastreux des produits chimiques ? Les ressorts de l’engagement dans une démarche naturelle peuvent être multiples mais tous les adeptes de ces pratiques cultivent, consciemment ou non, l’idéal d’une collaboration fructueuse avec la nature, dans une dimension presque sacerdotale, proche du sacré.

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Mme Christelle PINEAU, Doctorante en ethnologie à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS)