138e congrès, Rennes, 2013 - Se nourrir. Pratiques et stratégies alimentaires

mardi 23 avril 2013 - 14:00


Thème II. Du terroir au garde-manger planétaire

Sous-thème : II.A. Alimentation et développement

Titre : Une crise alimentaire provoquée ? La famine au Liban (1915-1918)

Présidents :
BART François
, professeur émérite de l'université Bordeaux III, membre de l'UMR LAM (Les Afriques dans le monde), IEP - CNRS, co-directeur de la revue Les Cahiers d'Outre MEr
AMALVI Christian , professeur d'histoire contemporaine à l'université Paul-Valéry - Montpellier III

Le Mont-Liban, petit territoire montagneux de l’Empire ottoman coincé entre les provinces de Saïda et de Damas, a, durant des siècles, présenté deux caractéristiques. Sa population a d’abord toujours manifesté un farouche esprit d’indépendance. Trop exigu, ce territoire n’a, par ailleurs, jamais été autosuffisant en matière alimentaire. Jusqu’en 1914, cette situation n’a pas posé de problème, les habitants du Mont-Liban réussissant, en échange de leur soie, à importer suffisamment de nourriture pour satisfaire leurs besoins.
Cet équilibre s’est rompu au cours de la Première Guerre mondiale : entre 1915 et 1918, la région fut touchée par une terrible famine qui devait emporter près du tiers de sa population. Cette période dramatique a laissé dans la mémoire libanaise des traces profondes et deux certitudes : la responsabilité écrasante des autorités ottomanes, qui, doutant de sa loyauté, auraient volontairement affamé la Montagne, le rôle central joué par l’armée française dans le sauvetage du Liban.
Sans être fausses, ces deux affirmations demanderaient à être nuancées. Loin d’être simples, les facteurs expliquant ce drame sont multiples, à la fois humains et naturels, intentionnels et accidentels. L’apport de l’armée française mériterait aussi d’être relativisé : il a d’abord été tardif, il n’a surtout pas été unique. D’autres acteurs sont intervenus pour aider les populations libanaises. Sur ce sujet comme sur tant d’autres, des discordances existent donc bien entre la mémoire et l’histoire, discordances que seule l’étude des sources devrait permettre d’atténuer.

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M. Yann BOUYRAT, Professeur agrégé et docteur en histoire, diplômé en sciences politiques, Chargé de cours à l'université catholique de l'Ouest (UCO), Angers