126e congrès, Toulouse, 2001 - Terres et hommes du Sud

mercredi 11 avril 2001 - 09:00


Thème 3 : cultures du Sud

Sous-thème : Modes de sociabilités méridionaux

Titre : La relation vigneron-tonnelier : la variabilité historique de l’image de l’autre. Exemple du vignoble de Cahors

Présidents :
GARRIER Gilbert
, professeur émérite de l’Université Lumière-Lyon II
TULET Jean-Christian , Directeur de recherches CNRS

Le monde du vin, de la plantation des ceps à la consommation, est un monde complexe et riche en symboles de tous genres. Le stade de sa fabrication est une étape parmi d’autres. Celle-ci échappe généralement, aujourd’hui, au sens commun et apparaît être l’étape cachée ou occultée du long processus viticole. Cette occultation marquée dans le temps est peut-être due au fait qu’elle est le moment de la rencontre particulière de deux savoir-faire singuliers, celui du tonnelier et celui du vigneron. Les deux sont indissociablement liés. Pourtant tout semble les opposer : l’un s’occupe du contenant, l’autre du contenu ; le premier transforme le bois mort, fabrique du solide alors que le second fait fructifier le bois vivant et produit du liquide.
Paradoxalement, ces différences les rapprochent et bien plus encore les lient l’un à l’autre pour un objectif commun, celui de produire du vin. Leurs savoir-faire singuliers voire opposés s’allient et participent, pour un temps donné, à une mission conjointe. C’est de la matérialité de leur savoir-faire réciproque, c’est-à-dire son étape aboutie -le tonneau pour l’un et le moût pour l’autre- que le produit final – le vin- dépendra. Alors qui sait mieux que quiconque " juger " un vigneron, si ce n’est un tonnelier et inversement. Ceci pose la question de la place et du rôle que s’attribue l’un à l’autre et de la représentation qu’ils ont l’un de l’autre.
De plus, au-delà de cette relation intime qui lie le vigneron et le tonnelier, au-delà de cette histoire conjugale en quelque sorte, qu’en est-il de la représentation accordée à chacun d’eux par les consommateurs ? Au fond, pour un amateur de vin, qui du vigneron ou du tonnelier participe le plus activement à la qualité, à la conservation ? Ces représentations extérieures, bien sûr, ne sont pas stables mais en mouvement dans le temps historique. En effet, en fonction de la reconnaissance sociale qui lui est accordée, la préférence reviendra plutôt à l’un ou plutôt à l’autre.
Nous tenterons de cerner ces mouvements subtils qui affectent les représentations au travers de l’étude de la viticulture cadurcienne au cours du XXe siècle. Cette région semble constituer un bon laboratoire d’analyse allant dans le sens de notre questionnement. En effet, la viticulture dans la région de Cahors a connu des transformations importantes depuis la fin du XIXe siècle, à l’issue de la crise phylloxérique. Ces dernières ont entraîné une reconquête progressive de la qualité du vin produit et des savoir-faire des protagonistes, modifiant par ce fait les images traditionnelles tant des viticulteurs que des tonneliers. Pour mener à bien ce travail, nous aurons recours à des sources historiques et nous nous proposons de mener des enquêtes.


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Mme Hélène VELASCO-GRACIET, Professeur de géographie à l'université Bordeaux-Montaigne - Bordeaux III